Russie, enclave de Kaliningrad. Un beau matin de février, encore endormie dans la grisaille brumeuse hivernale, la petite ville de Bagrationovsk, peuplée principalement de retraités et fonctionnaires, se remplit subitement de soldats du Premier Empire. Hussards, grenadiers, dragons, lanciers, cuirassiers, chasseurs, artilleurs, à cheval ou à pied, une myriade d’hommes en uniformes de toutes les couleurs directement sortis de l’épopée napoléonienne surgit et fourmille dans les rues bordées d’immeubles en béton, à la stupeur des habitants.
Venus de Russie, d’Ukraine, mais aussi de France, de Pologne, d’Allemagne et de Belgique, ils sont là pour reconstituer la bataille d’Eylau, survenue en ce lieu quelque deux cents ans plus tôt. Trois jours durant, ils demeurent dans la petite ville, ainsi vêtus, et vivent au rythme de la vie des soldats d’alors. Trois jours durant, deux époques se superposent étrangement. Le dernier jour, le combat a lieu dans la plaine jouxtant la ville. Fusillades, charges de cavalerie, coups de canons, clameurs des armées. Sur le sol enneigé et devant un vaste public se reproduit l’une des batailles les plus mémorables du Premier Empire.
A la tête des opérations, un homme en tenue de général, bicorne, veste bleu et or, qui galope et parade sur sa fière monture blanche, donne les ordres, harangue les troupes et mène les soldats au combat. Son nom, Oleg Sokolov. Historien du Premier Empire et admirateur de Napoléon, il est le fondateur des reconstitutions historiques en Russie. C’est lui qui les met en scène et en joue le rôle clé, celui du chef de la Grande Armée. Autour de lui, des officiers, sous-officiers et simples soldats. En face, le camp adverse, celui de l’armée du tsar.